Avis mitigé de l’autorité environnementale sur la clause filet

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L’autorité environnementale vient de rendre son avis sur le projet de décret permettant de soumettre à évaluation environnementale de petits projets susceptibles d’avoir une incidence sur l’environnement.

 

Pour rappel, ce projet de décret met en place le dispositif de « clause filet » sollicité par le Conseil d’Etat dans sa décision du 15 avril 2021 (n°425424). Dans cet arrêt, il avait en effet estimé que le droit français méconnaissait les objectifs de la directive européenne du 13 décembre 2011 et il avait ainsi enjoint au Premier Ministre de réviser, dans un délai de neuf mois, la nomenclature des projets soumis à évaluation environnementale de manière à ce qu’aucun projet susceptible d’avoir une incidence notable sur l’environnement ne puisse être dispensé d’évaluation environnementale, même s’il est en-deçà des seuils définis par la nomenclature.

 

Le projet de décret crée ainsi un nouvel article R. 122-2-1 dédié à cette clause filet au sein du code de l’environnement. Il prévoit que même si les caractéristiques du projet sont inférieures aux seuils définis par l’article R. 122-2 du code de l’environnement, si celui-ci est susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement, il sera soumis à la procédure d’examen au cas par cas pour décider si une évaluation environnementale de ce projet est nécessaire.

 

Cette initiative appartient à l’autorité compétente pour autoriser le projet mais également au porteur de projet qui pourra le faire volontairement.

 

Dans le cadre de la consultation publique menée jusqu’au 10 février sur ce projet de décret, l’autorité environnementale a donné son avis sur le dispositif retenu. Selon elle, la mise en œuvre de cette clause filet aurait dû lui être confiée.

 

Pour l’autorité environnementale, ce dispositif introduit en effet un niveau d’instruction et une autorité supplémentaires pour des projets qui ne seront qu’exceptionnellement soumis à évaluation environnementale. Cela participe donc à la complexité actuelle de la procédure, qui fait intervenir au titre de l’autorité environnementale des acteurs multiples et est source d’insécurité juridique pour les porteurs de projets. En outre, cela pose également la question de l’impartialité de l’autorité en charge du projet.

 

De plus, l’autorité environnementale relève qu’une possibilité de saisine de l’autorité compétente pour statuer sur la soumission du projet à évaluation environnementale par les des tiers aurait également dû être prévue, notamment des associations de protection de l’environnement.


L’autorité environnementale pointe en outre d’autres lacunes du dispositif, comme le fait que le juge administratif n’interviendra que suite à un recours portant sur la décision autorisant le projet et non pas dès la décision rendue sur la soumission à étude d’impact. Il y aura donc un décalage dans le temps, qui pourra être important, entre le moment où est prise la décision de ne pas soumettre un projet à évaluation environnementale, et le moment où la décision d’autorisation est susceptible d’être attaquée en justice. Le risque est alors grand, si l’autorisation fait l’objet d’une annulation, que la procédure doive être reprise très en amont, retardant d’autant le développement du projet.

 

Reste désormais à voir si la version définitive du décret prendra en compte ces critiques.

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